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L’administration de paracétamol par voie rectale dans la prise en charge de l’enfant fébrile est-elle encore pertinente ?


Auteur : Dr Pascal Boulet

L’enfant fébrile est un motif fréquent de consultation.

Un des volets de sa prise en charge comporte le contrôle de la fièvre.

Nombre d’enfants vus en consultation ont déjà reçu de la part des parents un traitement contre la fièvre. Ce traitement est administré de la propre initiative des parents, sur conseils du médecin, du pharmacien voire de l’entourage ou par le biais de conseils issus des médias. Le paracétamol est souvent la molécule utilisée en première intention soit sous forme orale mais aussi sous forme de suppositoire.

La biodisponibilité de la forme suppositoire est-elle équivalente à la forme orale ?

Une étude a été menée par l’unité de recherche épidémiologique de Paris Descartes. 4163 médecins généralistes et pédiatres ainsi que 4946 pharmaciens ont inclus 5 enfants fébriles entre 1 mois et 12 ans dans les 48 h.

  • 6255 enfants ont été analysés.
  • l’âge moyen était de 4 ans.
  • 91 % d’entre eux avaient reçu de la part des parents un traitement de nature antipyrétique dans 84% des cas avant la visite chez un professionnel de santé.
  • La forme suppositoire était utilisée dans 27 % des cas lorsque l’administrateur était le parent et dans 19 % des cas s’il s’agissait d’une prescription d’un professionnel de santé.

Ce qui orientait vers cette forme d’administration était l’existence :

  • de vomissement (17%),
  • le jeune âge (41% et 31% avant 2 ans respectivement dans le groupe parents et professionnel de santé),
  • l’absence de diarrhée (0R 0,44),
  • la présence de douleur (0R 0,80)
  • le professionnel de santé était un pharmacien (OR 2,44) (1)

L’administration de paracétamol sous forme suppositoires n’est pas rare en France. Toutefois cette forme est plus utilisée qu’en Grande-Bretagne où elle est inexistante mais moins qu’en Italie (27%) et surtout en Islande (97%)

La voie rectale pour les suppositoires de paracétamol assure-t-elle la même biodisponibilité que la voie orale ?

La biodisponibilité du suppositoire de paracétamol est fonction de nombreux paramètres tels la vacuité du rectum, la température, le PH ainsi que la surface du rectum et la caractère plus ou moins lipophile du suppositoire. La position du suppositoire dans le rectum a également une influence car en position proximale l’absorption effectuée par la veine rectale impose un premier passage hépatique à la dose de paracétamol ce qui n’est pas le cas lorsque le suppositoire est en position distale (1).

Plusieurs études conduites entre 1997 et 2000 concluait à une biodisponibilité très variable entre 0,28 et 0,98 avec une meilleure disponibilité chez les plus jeunes patients (2).

Cependant des études plus récentes ont montré l’absence de différence significative concernant la rapidité d’apparition du pic de concentration et la vitesse d’élimination obtenues après administration orale ou rectale d’une dose identique de paracétamol (3).

Une méta-analyse de 2008 concluait à l’absence de différence entre la forme orale et rectale pour faire baisser la fièvre (4).

Une autre étude a comparé, après administration IV, PO ou rectale chez 7 adultes de plus de 18 ans à 45 ans, la concentration de paracétamol dans le système nerveux central, zone effective du paracétamol pour lutter contre la fièvre et la douleur. Si la concentration maximale a été plus vite atteinte par la voie IV, il n’y a aucune différence de concentration dans le liquide cérébrospinal à 3,5, 5 et 6 h après administration et ce quelle que soit la voie utilisée (5).

En conclusion :

La biodisponibilité de paracétamol par voie rectale varie selon certains paramètres tels le jeune âge du sujet et également selon la position du suppositoire dans le rectum.

Son utilisation semble aussi efficace que la voie orale pour contrôler une fièvre.

Bibliographie

1. Bertille N, Fournier-Charrière E, Pons G, Khoshnood B, Chalumeau M. Enduring large use of acetaminophen suppositories for fever management in children : a national survey of French parents and healthcare professionals’ practices. European Journal of Pediatrics. juill 2016 ;175(7):987‑92.

2. Anderson BJ, Woollard GA, Holford NHG. A model for size and age changes in the pharmacokinetics of paracetamol in neonates, infants and children. British Journal of Clinical Pharmacology. août 2000 ;50(2):125‑34.

3. Walson PD, Halvorsen M, Edge J, Casavant MJ, Kelley MT. Pharmacokinetic Comparison of Acetaminophen Elixir Versus Suppositories in Vaccinated Infants (Aged 3 to 36 Months) : A Single-Dose, Open-Label, Randomized, Parallel-Group Design. Clinical Therapeutics. févr 2013 ;35(2):135‑40.

4. Goldstein LH, Berlin M, Berkovitch M, Kozer E. Effectiveness of Oral vs Rectal Acetaminophen : A Meta-analysis. Archives of Pediatrics & Adolescent Medicine. 1 mai 2008 ;162(11):1042.

5. Singla NK, Parulan C, Samson R, Hutchinson J, Bushnell R, Beja EG, et al. Plasma and Cerebrospinal Fluid Pharmacokinetic Parameters After Single-Dose Administration of Intravenous, Oral, or Rectal Acetaminophen : Intravenous, Oral and Rectal Acetaminophen Pharmacokinetics. Pain Practice. sept 2012 ;12(7):523‑32.